Une robe, une robe majestueuse attendait patiemment que je l’enfile, cependant je ne pouvais me résigner à la mettre ou seulement la toucher parce qu’elle ne m’appartenait pas. En entrant dans ma chambre impeccablement rangée je remarquai immédiatement qu’un élément jurait avec les tons neutres de la décoration, une robe écarlate, mise en évidence sur les draps immaculés de mon lit. Elle était à n’en pas douter tissée dans une matière soyeuse qui miroitait sous la douce lumière du crépuscule, la découpe du vêtement épurée au niveau des manches se limitant à deux morceaux d’étoffes destinées au maintien des épaules, laissait entrevoir un décolleté discret pour ensuite allonger le bassin dans un bustier léger et finir en une échancrure qui exibait mes tibias. La robe était accompagnée d’une courte lettre écrite de la main de Chihiro, mon amie de toujours.
"Baaaaka je te conseille d’aller t’amuser où tu auras affaire à moi !!!"
Chihiro.
Si telle était la volonté de Chihiro, il était impensable que j’aille à l’encontre de ses injonctions menaçantes. Avant de que je ne découvre la robe, mes intentions pour la soirée se résumaient à la contemplation de la voûte céleste tandis que la fête battrait son plein. Jamais encore je n’avais mis les pieds dans une salle de bal, chaque fois que je m’en approchais, je ne pouvais m’empêcher de ressentir une profonde solitude comme si ce monde ne me concernait pas et cette impression de malaise n’était sans doute pas infondée. Mais puisque l’ordre émanait de Chihiro la question ne se posait même pas, j’irai à ce bal. Je commençai par me déshabiller en contemplant la robe avec appréhension, cette teinte écarlate mettra mon teint blafard en valeur de façon presque choquante, les gouts de Chihiro en matière de tenues vestimentaires étaient largement discutable. Une fois habillée, je me plantai face au miroir de la salle de bain et nouai ma chevelure dans un chignon dont quelques mèches folle refusaient d’être domptées par mes mains impérieuses. En guise de soulier Chihiro avait également mis la main à la patte, mais marcher plus de quelques mètres avec ces talons gigantesques relevait de l’exploit.
-Et voila le tour est joué Chihiro serait fière de moi…
Je désertai la chambre en claudiquant légèrement. Une fois en vue de la salle de bal je m’immobilisai histoire d’apprécier à sa juste valeur le spectacle féerique qui se déroulait sous mes yeux. Un nombre incalculable de couples valsaient en rythme avec une mélodie envoûtante propice à l’épanouissement de certaines relation encore nébuleuses. Les quelques rares personnes qui faisaient cavalier seul se disséminaient un peu partout aux abords de la salle sans jamais se mêler aux danseurs, encore une fois cette sensation de non-acceptation prit ma gorge dans un étaux, je secouai la tête en me reprenant. Au coin le plus sombre de la salle régnait parmis les ténèbres un piano. Je me précipitai dans sa direction la mine réjouie. De toute évidence l’instrument n’avait pas servi depuis des lustre à en juger par l’épaisse couche de poussière qui en recouvrait les touches grisâtres.
-Je vais arranger ça.
Je fis courir mes doigts le longs des touches et appuyai sur la dernière note, la plus aigue qui sonna crescendo au milieu de l’ambiance festive de la salle en pleine effervescence. Un frémissement de joie secoua mon corps tout entier. Je n’aurais pu espérer mieux pour cette soirée.
En premier morceau je jouais la « gymnopedie n°1 » composée par Erik Satie. Les notes étaient comme imprimée dans les fibres de mes doigts, ils virevoltaient en laissant leur empreinte sur les touches empoussiérées.
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